Considérée comme perdue dans les années 1980 car trop polluée, la Méditerranée présente aujourd’hui des signes de bonne santé car les acteurs du littoral et de la mer agissent pour lutter contre la pollution, acquérir des connaissances sur l’état des eaux, faire évoluer la réglementation sur les mouillages en zone côtière, restaurer les petits fonds côtiers dégradés… Les résultats d’une récente étude sur la perception de l’état de la Méditerranée par ses riverains directs montrent qu’ils placent la lutte contre la pollution comme priorité, suivie par la restauration de la biodiversité. En effet, 45 % des petits fonds côtiers sont encore menacés par les activités sur le littoral privant les jeunes poissons des habitats nécessaires à leur croissance.
La lutte contre la pollution : le défi des eaux de pluie – La surveillance des eaux marines montre des eaux littorales plutôt en bon état, signe de progrès en matière de dépollution des eaux usées urbaines et industrielles. En 20 ans, la capacité de traitement des stations d’épuration a été multipliée par 10 et les collectivités sur le littoral sont désormais équipées de 250 systèmes d’assainissement. C’est 15 fois plus que dans les années 1980. Aujourd’hui, 88 % des eaux côtières sont en bon état chimique et 84 % sont en bon état écologique. Quant aux eaux de baignade, elles sont conformes aux normes sanitaires pour 95 % d’entre elles. Pour autant, la pollution par temps de pluie doit notamment être davantage maîtrisée car on estime à 11 % la part des apports de polluants à la mer par ces ruissellements. La désimperméabilisation des sols pour infiltrer l’eau là où elle tombe et, quand c’est nécessaire, la construction de bassins de stockage des eaux de pluie, se développent pour empêcher l’eau qui ruisselle de faire déborder les réseaux d’assainissement et d’entrainer les polluants vers la mer.
45 % des petits fonds côtiers encore menacés – 45 % des petits fonds côtiers sont encore menacés par les activités sur le littoral et les usages en mer. La bonne régulation de l’impact des navires de plaisance sur les habitats côtiers et plus particulièrement sur les herbiers de Posidonie est par exemple vitale sous peine de voir disparaître ce "poumon" de la mer. La Posidonie séquestre le carbone, produit de l’oxygène en grande quantité et abrite environ 20 % des espèces animales et végétales. En atténuant la houle, elle limite l’érosion du littoral. C’est un rempart contre les effets du changement climatique dans la zone côtière. On estime que 10 % des herbiers de posidonie ont disparu ces 100 dernières années. En cause notamment, l’augmentation des loisirs maritimes et le mouillage des bateaux de plaisance dont les ancres et les chaînes raclent les fonds marins. La récente évolution de la réglementation encadrant le mouillage des bateaux de plus de 24 mètres marque une étape importante pour la protection de la Posidonie. Cependant, l’équipement du littoral en zones de mouillages légers grâce à des bouées d’ancrage reste à développer pour maîtriser l’impact des navires de petites à moyennes tailles.
40 dispositifs de surveillance – La connaissance de l’état de santé de la Méditerranée et de ses réactions vis-à-vis des pressions qu’elle subit est indispensable pour guider les actions de préservation. De nombreux dispositifs de surveillance et programmes de recherche y contribuent. À ce titre, la Méditerranée est la façade française la plus surveillée avec plus de 1 500 informations annuelles et 40 dispositifs de surveillance. Une grande avancée pour la Méditerranée est l’utilisation de l’ADN environnemental et de la bio-acoustique, deux méthodes innovantes qui permettent de mieux étudier la biodiversité et de mesurer l’impact de nos activités maritimes et du bruit ambiant sur le milieu marin. La période de confinement de mars 2020 a été l’occasion d’étudier la zone côtière en l’absence quasi-totale d’usages maritimes. Des observations par plongées sous-marines, des techniques d’ADN environnemental et de bio-acoustique ont montré que de nombreux mammifères, tortues et poissons sont revenus en nombre avec 25 % d’espèces présentes en plus sur les sites étudiés, souvent près de la côte. La reprise estivale des activités a de nouveau éloigné certaines espèces. Ces nouvelles observations incitent à poursuivre les démarches d’organisation des usages en mer pour mieux les concilier avec la préservation de l’environnement marin.
La restauration écologique des fonds côtiers – Il ne suffit pas d’investir pour réduire les pollutions et éviter les dégradations du milieu marin, il faut également restaurer les fonds côtiers abîmés et la vie qui a disparu. L’efficacité des actions de lutte contre la pollution et l’amélioration des connaissances donnent aujourd’hui la possibilité de donner un coup de pouce à la nature en restaurant les fonctions écologiques altérées comme la fonction nurserie ou l’habitat. Dans les ports, l’installation de nurseries artificielles permet ainsi aux jeunes poissons de retrouver une maison et un garde-manger. En mer, l’immersion de récifs artificiels et la restauration des habitats côtiers favorisent le retour à la vie marine. Aujourd’hui, 40 % des ports de notre littoral sont équipés d’habitats artificiels pour la protection des jeunes poissons et 30% des fonctions écologiques détruites par les aménagements portuaires ont été restaurées. Par exemple, les habitats artificiels installés au Grand Port Maritime de Marseille accueillent chaque année environ 4 000 poissons dont les larves sont prélevées dans le milieu naturel, puis élevées dans des aquariums à l’abri des prédateurs, avant d’être relâchées en mer une fois suffisamment grandies. Les résultats sont spectaculaires, le taux de survie des œufs de poissons jusqu’au stade juvénile dépasse les 90 % contre 5 % en milieu naturel.
L'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée Corse investit chaque année près de 70 millions d’euros en faveur de la Méditerranée. L’agence cible tout particulièrement ses aides financières sur la lutte contre les apports par temps de pluie, la diminution de la pression de mouillage sur les habitats sensibles dont l’herbier de Posidonie, la restauration de la fonction nurserie dans les zones portuaires et la poursuite des travaux liés à la connaissance et à la surveillance des eaux côtières. En 2020, elle a soutenu plus de 1 000 dossiers pour un montant d’aide de 69 millions d’euros répartis entre : la lutte contre la pollution domestique, industrielle et agricole ; la restauration écologique ; la surveillance ; la connaissance.
Sauver la Méditerranée, c’est possible ! – Film d’animation sur la reconquête de la Méditerranée